Origine professionnelle prise en compte trop tard

Cour de cassationOrigine professionnelle de l’inaptitude : A partir de quand faut-il prendre en compte l’origine professionnelle de l’inaptitude ? L’employeur peut-il attendre en cas d’incertitude entre origine professionnelle et non-professionnelle de l’inaptitude ? Quelles étaient les conséquences en cas de prise en compte trop tardive dans la procédure de licenciement pour inaptitude d’une origine professionnelle, avant la réforme de 2017 ? Jurisprudence de la cour de cassation.

Le contexte du licenciement pour inaptitude

Un salarié recruté en juin 2002, a été en arrêt maladie à compter à compter du 1er juillet 2010. A l’issue de deux visites médicales du travail, espacées de 15 jours, les 15 et 29 octobre 2010, le médecin du travail a prononcé l’inaptitude de ce salarié à son poste de travail. L’employeur met alors en œuvre la procédure débutant par la recherche d’un reclassement. Puis, à la suite, il propose à son salarié, le 22 novembre 2010, deux possibilités de reclassement à Gonesse et à Marseille. Ces propositions tenaient compte des contre-indications de la médecine du travail.

Mais, le salarié rejette ces propositions le 26 novembre. Peu de temps après, la sécurité sociale informe l’employeur, par courrier en date 7 décembre 2010, qu’elle reconnait le caractère professionnel de l’affection du salarié. Du fait de cette notification, le 17 décembre 2010 l’employeur convoque les délégués du personnel. Et il les consulte sur les recherches de reclassements réalisées, au cours d’une réunion qui se tient le 27 décembre suivant.

Ensuite, l’employeur licencie le salarié pour inaptitude d’origine professionnelle, le 19 janvier 2011.

Le contentieux : respect ou non de la procédure ?

A la suite de son licenciement pour inaptitude, le salarié a saisi la juridiction prud’homale. Et il a demandé :

  • la condamnation de l’employeur au paiement d’une indemnité pour licenciement abusif,
  • ainsi que des dommages et intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement.

Mais le conseil de prud’hommes a jugé infondé les demandes du salarié. Ensuite, ce fut la cour d’appel de Limoges qui se prononça le 6 mai 2013 dans le même sens.

L’arrêt de la cour d’appel

Pour débouter le salarié l’arrêt de la cour d’appel a relevé :

  • que deux postes de type administratif correspondant aux préconisations du médecin du travail avaient été proposés à l’intéressé, que celui-ci avait refusés, cela sans consultation des délégués du personnel ;
  • que la caisse primaire d’assurance-maladie (CPAM) n’a notifié au salarié et à l’employeur que le 7 décembre 2010 sa décision de prise en charge de la pathologie du salarié à l’origine de son inaptitude au titre d’une maladie professionnelle ;
  • et que l’employeur, en convoquant le 17 décembre 2010 les délégués du personnel pour recueillir leur avis sur les recherches de reclassement, a respecté, non seulement son obligation légale de reclassement, mais aussi la formalité substantielle de consultation des délégués du personnel.

L’argumentation du salarié devant la Cour de cassation : l’employeur savait, mais a prise en compte trop tard l’origine professionnelle

Dans son argumentation devant la Cour de cassation, le salarié a fait valoir que l’employeur avait connaissance depuis le 12 juillet 2010, de sa déclaration de maladie professionnelle. Un courrier de la CPAM adressée au salarié le 6 octobre 2010 le confirme. Ainsi qu’une lettre de l’employeur du 19 octobre 2010, par laquelle celui-ci proposait au salarié de poser des congés dans l’expectative de la « reconnaissance de la maladie professionnelle par la sécurité sociale ». Donc, l’employeur sachant, la prise en compte de l’origine professionnelle intervenait trop tard.

La cassation basé sur la prise en compte trop tard de l’origine professionnelle de l’inaptitude

La Cour de cassation a considéré « Qu’en statuant ainsi, alors qu’il appartenait à l’employeur, dès lors qu’il avait connaissance de l’origine professionnelle de l’inaptitude, de respecter l’obligation légale de consultation des délégués du personnel antérieurement aux éventuelles propositions de reclassement, et qu’il ressortait de ses constatations que les délégués du personnel avaient été consultés postérieurement aux offres de reclassement du salarié, la cour d’appel a violé [l’article L 1226-10 du code du travail] ». 

En conséquence la cour de cassation a cassé et annulé l’arrêt de la cour d’appel.

(Cour de cassation, chambre sociale, 25 mars 2015, N° : 13-28229).

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Conclusion et limite de l’effet de cette jurisprudence :

Pour la Cour de cassation, l’employeur étant informé de la demande de reconnaissance auprès de la CPAM du caractère professionnel de sa pathologie par le salarié, aurait dû respecter l’obligation légale de consultation des délégués du personnel avant les propositions de reclassement. Alors même que la CPAM ne s’était pas encore prononcée.

Aujourd’hui, les membres du comité social et économique sont substitués aux délégués du personnel.

Depuis la réforme de 2017, les choses ont changées. Les employeurs doivent consulter les représentants du personnel avant de proposer un reclassement, que l’inaptitude soit d’origine professionnelle ou non. Les différences de procédure ont, en effet, été supprimées. Par conséquent, les employeurs ne peuvent plus subir la conséquence d’une consultation trop tardive des représentants du personnel, du fait qu’ils auraient à tord pensé, dans un premier temps, que l’inaptitude était non-professionnelle. Toutefois, il n’en reste pas moins, que l’employeur doit prendre en compte l’origine professionnelle dès qu’il en a connaissance. Même en l’absence d’une décision de la CPAM.

Article rédigé par Pierre LACREUSE : Sciences-Po Paris, licence en droit et DESS Université de Paris I Panthéon-Sorbonne. Ancien Directeur de la Gestion du personnel et des Relations Sociales, DRH, puis chef d’entreprise (PME). Et aujourd’hui éditeur juridique et relations humaines sur internet.

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Source de la jurisprudence arrêt de la Cour de cassation : Legifrance.gouv.fr

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