Refus légitime du reclassement par le salarié

Refus légitime du reclassement par le salariéRefus légitime du reclassement par le salarié, ou refus non abusif du reclassement : si les fonctions sont modifiées, ou si les interdits du médecin du travail ne sont pas pris en compte, le refus du poste par le salarié est légitime. Un poste proposé en reclassement à un salarié inapte doit être aussi comparable que possible à celui que le salarié occupait précédemment. Si ce n’est pas le cas et que l’employeur ne justifie pas l’impossibilité de reclassement, le licenciement ne respecte pas les dispositions légales. 

L’origine et le contexte du licenciement pour inaptitude

Un salarié a été employé à partir du 1er novembre 1978 par une association sportive et culturelle en qualité de responsable d’un Centre d’accueil. Il a ensuite continué à exercer son activité au service de la régie départementale du Lioran, qui avait succédé à l’association. Ce responsable de Centre d’accueil a été victime d’un accident du travail le 17 janvier 1981. A la suite de cet accident, il a suivi un stage de formation professionnelle puis, après avis du médecin du travail, il a été provisoirement réintégré par la régie dans un poste d’ouvrier le 7 octobre 1983.

Peu après, lors d’une nouvelle visite à la médecine du travail, le salarié est déclaré inapte à reprendre son ancien poste. Prenant en compte cet avis d’inaptitude médical, l’employeur a proposé au salarié, un poste d’ouvrier correspondant au coefficient 131 de la convention collective. Ayant refusé l’offre de reclassement de son employeur, le salarié a été licencié le 7 décembre 1983.

Le contentieux : obligations de reclassement de l’employeur et refus du salarié

Licencié pour son inaptitude, le salarié a saisi la juridiction prud’homale d’une demande tendant à la condamnation de son employeur à lui payer différentes sommes.

Saisie après le conseil de prud’hommes, la Cour d’appel de Riom a attribué des dommages-intérêts au salarié, le 17 avril 1986, en reprochant à l’employeur de n’avoir pas justifié de son impossibilité de proposer un emploi  approprié aux capacités du salarié et aussi comparable que possible à l’emploi précédemment occupé (ce que prévoit la loi).

Le pourvoi de l’employeur en cassation

Dans son pourvoi devant la Cour de cassation, l’employeur reprochait à l’arrêt de la cour d’appel de s’être borné à analyser les emplois proposés au salarié en fonction de son ancien emploi, sans avoir recherché s’ils correspondaient à ses nouvelles compétences professionnelles. L’employeur rappelant que le salarié avait acquis, pendant son arrêt de travail, un CAP de menuiserie pour permettre une reconversion professionnelle, soulignait que les emplois proposés à l’intéressé tenaient compte de sa formation professionnelle nouvellement acquise, notamment un poste d’ouvrier tous corps d’état et qu’était proposé un poste de conducteur d’engin de damage effectuant l’entretien courant, que le salarié avait lui-même demandé.

La décision de la Cour de cassation

La Cour de cassation a considéré que « la cour d’appel, recherchant si les emplois proposés à [M. X…] étaient, compte tenu de ses capacités, aussi comparables que possible à celui qu’il occupait avant son accident, a, en relevant les caractéristiques des fonctions ainsi offertes, constaté qu’elles étaient entièrement différentes de l’emploi occupé précédemment et qu’elles pouvaient amener ce salarié à intervenir dans une région montagneuse, sur des terrains accidentés où la marche prolongée lui avait été interdite par le médecin du travail ; qu’elle a pu déduire qu’aucun de ces emplois ne satisfaisait aux conditions exigées par l’article L. 122-32-5 du Code du travail » ;

La Cour de cassation a ensuite indiqué que « l’arrêt attaqué ayant ainsi admis que le refus de [M. X…] d’accepter ces nouvelles fonctions était justifié, c’est par une exacte application des dispositions [du code du travail] qu’il a, en constatant que l’employeur ne justifiait pas de l’impossibilité dans laquelle il se trouvait de proposer un emploi dans les conditions légales, estimé que le licenciement avait été prononcé en méconnaissance des prescriptions de ce texte ».

En conséquence, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi de l’employeur.

(Cour de cassation, chambre sociale, 10 novembre 1988, N°: 86-42807)

Conclusion :  La Cour de cassation a rappelé qu’en application du code du travail les caractéristiques des fonctions offertes en reclassement à un salarié inapte à la suite d’un accident du travail doivent être aussi comparables que possible à celle de l’emploi occupé précédemment (peu importe que le salarié soit compétent pour d’autres fonctions) et qu’elles ne devaient pas amener le salarié à exécuter des travaux interdits par le médecin du travail. A défaut, le refus du salarié d’accepter ses nouvelles fonctions était justifié (non abusif).

La Cour de Cassation a de plus considéré que, dans la mesure où l’employeur ne justifiait pas de l’impossibilité de proposer un emploi dans les conditions légales, le licenciement avait été prononcé en méconnaissance des dispositions de l’article L. 122-32-5  1er alinéa du Code du travail (ancien), reprise dans l’article L1226-10 3ème alinéa, pour le licenciement pour inaptitude d’origine professionnelle. Les mêmes obligations existent pour le licenciement pour inaptitude d’origine non professionnelle à l’article L1226-2 3ème alinéa.

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Article rédigé par Pierre LACREUSE, Sciences-Po Paris, licence en droit et DESS Université de Paris I Panthéon-Sorbonne, ancien Directeur de la Gestion du personnel et des Relations Sociales, DRH, puis chef d’entreprise (PME), aujourd’hui éditeur juridique et relations humaines sur internet.

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Source de la jurisprudence arrêt de la Cour de cassation : Legifrance.gouv.fr

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