Maladie professionnelle – refus de reclassement

Jurisprudence de la Cour de cassationRefus de reclassement par un salarié en inaptitude pour maladie professionnelle : refus abusif privatif des indemnités spéciales de licenciement, ou droit au refus du poste ; licenciement pour faute grave, licenciement pour cause réelle et sérieuse, ou licenciement abusif ? Ce que doit faire l’employeur dans le cas d’un refus de reclassement  par un salarié en inaptitude pour maladie professionnelle. Conséquence d’un refus abusif de reclassement.  Jurisprudence de la cour de cassation.

L’origine professionnelle de l’inaptitude et le contexte du licenciement  

Un salarié embauché en 1992 en qualité d’opérateur de chaîne avait été affecté trois ans plus tard à un poste de peintre industriel.  Après un arrêt de travail pour maladie professionnelle, il avait été une première fois déclaré inapte à tout poste nécessitant un contact direct avec les peintures en poudre. Il avait alors été affecté en 1998 à un poste d’accrochage-décrochage. A la suite un nouvel arrêt de travail de plus de quatre mois pour des raisons similaires d’origine professionnelle non contestée et après deux examens du salarié, le médecin du travail prononça un avis d’inaptitude au poste le 19 juin 2006.

Proposition de reclassement par l’employeur

17 jours plus tard, l’employeur  proposait un poste de reclassement avec sa description et le maintien de l’horaire de travail et de la rémunération.

Le salarié a  contesté la proposition et l’a finalement refusée en affirmant qu’elle ne correspondait pas aux spécifications du médecin du travail, en s’en prenant à l’intégrité et aux compétences du DRH et en menaçant de saisir les juridictions civiles et pénales.

Licenciement pour faute grave par l’employeur

Après des mises en demeure, le 6 octobre 2006, le salarié fut licencié pour faute grave pour le motif qu’il avait refusé sans raison légitime de reprendre le travail sur le poste de reclassement lui ayant été proposé.  L’employeur estimait que le poste avait été validé par le médecin du travail et par l’inspecteur du travail ayant statué sur recours du salarié.

Le contentieux : quelle conséquence au refus de reclassement ?

Le salarié à la suite de son licenciement a saisi la juridiction prud’homale.

L’arrêt de la cour d’appel

Le 8 septembre 2009, la Cour d’appel de Besançon a débouté le salarié de ses demandes de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, indemnité spéciale de licenciement et indemnité compensatrice de préavis.

Selon l’arrêt de la cour d’appel, le refus réitéré du salarié de rejoindre le poste de reclassement lui ayant été proposé, alors que ce poste était conforme aux préconisations du médecin du travail et n’entraînait aucune modification substantielle de son contrat de travail, ni même de ses conditions de travail, était manifestement abusif. Selon cet arrêt, l’abus dans l’exercice d’un droit constitue nécessairement une faute et il ne pouvait être reproché à l’employeur d’avoir placé la procédure de licenciement sur le terrain disciplinaire.

La Cour d’appel a cependant écarté la qualification de faute grave au motif que l’employeur avait « temporisé pendant plus de deux mois » jusqu’à l’intervention de la décision de l’inspecteur du travail avant de procéder au licenciement.

Les pourvois en cassation

Le salarié contestant l’arrêt de la cour d’appel a  formé un pourvoi auprès de la Cour de cassation, avec une série d’arguments. L’employeur insatisfait de la requalification de la faute grave en simple cause réelle et sérieuse de licenciement a pour sa part formé un pourvoi incident.

La cassation

Au visa des articles L 1226-10,  L 1226-12,  L 1226-14 et L 1226-15 du code du travail, la Cour de cassation, dans entrer dans le détail des arguments présentés a considéré :

  • « que le salarié déclaré inapte à son poste à la suite d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle est en droit de refuser le poste de reclassement proposé et qu’il appartient à l’employeur de tirer les conséquences d’un tel refus, soit en formulant de nouvelles propositions, soit en procédant au licenciement de l’intéressé au motif de l’impossibilité de reclassement »,
  •  « que le caractère abusif d’un refus, à le supposer établi, a pour seule conséquence de lui faire perdre le bénéfice des indemnités spécifiques prévues par l’article L. 1226-14 du code du travail »,
  • et qu’en conséquence, « la cour d’appel a violé les textes susvisés ».

Par ces motifs, et sans juger nécessaire de statuer sur le pourvoi incident, la Cour de cassation a cassé et annulé dans toutes ses dispositions l’arrêt de la Cour d’appel de Besançon.

(Cour de cassation, chambre sociale, 25 mai 2011, N° : 09-71543)

Conclusion : Dans cette affaire concernant les suites d’une inaptitude d’origine professionnelle, la cour de cassation a réaffirmé :

  • que le salarié est en droit de refuser le poste de reclassement ;
  • que l’employeur doit tirer les conséquences d’un tel refus, soit en formulant de nouvelles propositions de reclassement, soit en procédant au licenciement de l’intéressé au motif de l’impossibilité de reclassement ;
  • et que le caractère abusif d’un refus, n’a pour conséquence que la perte par le salarié des indemnités spécifiques au licenciement pour inaptitude d’origine professionnelle.

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Article rédigé par Pierre LACREUSE, Sciences-Po Paris, licence en droit et DESS Université de Paris I Panthéon-Sorbonne, ancien Directeur de la Gestion du personnel et des Relations Sociales, DRH, puis chef d’entreprise (PME), aujourd’hui éditeur juridique et relations humaines sur internet.

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Source de la jurisprudence arrêt de la Cour de cassation : Legifrance.gouv.fr

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