Médecin du travail et justification de l’impossibilité de reclassement

Médecin du travail et justification de l’impossibilité de reclassementSi l’avis du médecin du travail déclarant un salarié inapte dans l’entreprise ne dispense pas l’employeur sauf cas prévu par la loi (1), quelle que soit la position prise par le salarié, de son obligation de rechercher un reclassement au sein de l’entreprise et, le cas échéant, du groupe auquel celle-ci appartient, les réponses apportées, postérieurement au constat de l’inaptitude, par le médecin du travail sur les possibilités éventuelles de reclassement concourent à la justification par l’employeur de l’impossibilité de reclassement.

L’avis d’inaptitude du médecin du travail

Une salariée engagée par la société Plastic omnium en septembre 1983, comme employée du service du personnel, dont son contrat de travail a été transféré à la société 3P en janvier 1992, a été promue en 2004 au poste de responsable administratif du personnel.

Le médecin du travail a émis un avis d’inaptitude à son poste de cette salariée le 21 juin 2011. Le médecin du travail n’a alors nullement fait référence à un accident du travail ou une maladie professionnelle. A la suite la salariée a été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement le 8 septembre 2011.

L’ancienne responsable administratif du personnel a alors saisi la juridiction prud’homale.

Le contentieux prud’homal

La cour d’appel de Dijon a dit le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse et a débouté la salariée de ses demandes, le 19 décembre 2013.

Le pourvoi en cassation de la salariée

La salariée déboutée a formé un pourvoi en cassation, avec l’argumentation suivante :

  • Pour considérer que l’employeur avait sérieusement cherché à la reclasser dans les entreprises du groupe, la cour d’appel s’est bornée à dire, concernant une possibilité de reclassement dans les établissements de Clichy et d’Espagne, que ces établissements avaient un lien hiérarchique avec la DRH, sans constater que l’employeur avait recherché les possibilités de reclassement au sein de ces établissements.
  • La cour d’appel s’est, pour l’essentiel, borné à retenir que deux semaines après l’avis d’inaptitude le médecin avait précisé, qu’aucun poste ne pouvait convenir au sein de la société 3P France « en raison de l’inaptitude qui est relationnelle envers toute la hiérarchie au sein de l’entreprise » et avait montré ce que l’organigramme faisait apparaître.

Ainsi, selon la salariée, la cour d’appel n’a pas caractérisé une recherche sérieuse par l’employeur de postes disponibles dans l’entreprise et compatibles avec les préconisations du médecin du travail.

L’arrêt de la Cour de cassation

La Cour de cassation a indiqué que « si l’avis du médecin du travail déclarant un salarié inapte à tout poste dans l’entreprise ne dispense pas l’employeur, quelle que soit la position prise par le salarié, de son obligation légale de recherche de reclassement au sein de cette entreprise et, le cas échéant, du groupe auquel celle-ci appartient, les réponses apportées, postérieurement au constat régulier de l’inaptitude, par ce médecin sur les possibilités éventuelles de reclassement concourent à la justification par l’employeur de l’impossibilité de remplir cette obligation ».

NB : Depuis l’entrée en vigueur au 1er janvier  2017 des dispositions de la loi Travail du 8 août 2016, le médecin du travail peut mentionner sur l’avis d’inaptitude son opposition au reclassement pour des raisons médicales en utilisant une formulation prévue par la loi (1). Dans ce cas et seulement dans ce cas, l’employeur n’a pas à rechercher de reclassement pour le salarié déclaré inapte. En dehors de l’apposition de l’une des mentions prévues par la loi par le médecin du travail (1), l’employeur reste tenu de rechercher un reclassement pour le salarié, quand bien même le médecin du travail aura indiqué une inaptitude à tout poste dans l’entreprise.

La Cour de cassation a poursuivi en relevant que « la cour d’appel, procédant aux recherches prétendument omises, a fait ressortir l’impossibilité de reclasser la salariée au sein tant de l’entreprise que du groupe, y compris par la mise en œuvre de mutations ou transformations de poste, ce au regard notamment des préconisations du médecin du travail interdisant de maintenir un lien avec certaines personnes », pour conclure que l’argumentation du salarié n’était pas fondé et donc rejeté son pourvoi (Cour de cassation, chambre sociale, 15 décembre 2015, N° : 14-11858).

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Conclusion : Les réponses apportées, postérieurement au constat régulier de l’inaptitude au poste ou à tout poste dans l’entreprise, par le médecin du travail quant aux possibilités éventuelles de reclassement participent à la justification par l’employeur de l’impossibilité de reclassement au sein de l’entreprise et, le cas échéant, du groupe auquel l’entreprise appartient.

Article rédigé par Pierre LACREUSE, Sciences-Po Paris, licence en droit et DESS Université de Paris I Panthéon- Sorbonne, ancien Directeur de la Gestion du personnel et des Relations Sociales, DRH, puis chef d’entreprise (PME), aujourd’hui Editeur juridique et relations humaines sur internet.

(1)  Le médecin du travail peut apposer une mention particulière sur l’avis d’inaptitude : « tout maintien du salarié dans l’entreprise serait gravement préjudiciable à sa santé » ou « l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l’emploi ». En apposant l’une de ces deux mentions, le médecin du travail écarte tout reclassement du salarié dans l’entreprise et rend possible le licenciement sans que l’employeur doive rechercher un reclassement.

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Sources : jurisprudence arrêt de la Cour de cassation : Legifrance.gouv.fr

 

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