Salarié protégé : pouvoir de l’inspecteur du travail

Conseil d'EtatSalarié protégé : pouvoir de l’inspecteur du travail. Explication du pouvoir de l’inspecteur du travail dans l’examen d’une demande d’autorisation de licenciement pour inaptitude d’un salarié protégé. Est-ce le motif du licenciement, c’est à dire la réalité de l’existence de l’inaptitude et de l’impossibilité du reclassement, ou bien la cause de l’inaptitude que doit examiner l’inspecteur du travail ? La question a été soumise au Conseil d’Etat qui a tranché. Quelles en sont les conséquences ?

Le contexte : licenciement pour inaptitude d’une salariée protégée

Une salariée protégée a été déclarée inapte à son poste de travail le 3 décembre 2003 par le médecin du travail. L’employeur, la société UPC France,  a recensé les postes à pourvoir dans la société et a estimé après consultation de la médecine du travail, qu’aucun de ces postes n’était compatible avec les constatations d’inaptitude du médecin du travail.

Une demande d’autorisation de licenciement a alors été présenté à l’inspecteur du travail, dans le cadre des règles protectrices des salariés représentants du personnel ou syndicaux. L’inspecteur du travail, après vérification de l’inaptitude et de l’impossibilité de reclassement, a donné le 23 juin 2003 son autorisation au licenciement pour inaptitude. A la suite, l’employeur a licencié la salariée.

Le contentieux administratif mené par la salariée licenciée pour inaptitude

La salariée contestant la décision de l’inspecteur du travail a saisi le Tribunal administratif de Limoges. Par  jugement du 25 mars 2010 le tribunal administratif a rejeté la demande de la salariée portant sur la légalité de la décision de l’inspecteur du travail autorisant l’employeur à la licencier pour inaptitude.

La salariée a alors présenté une requête demandant l’annulation du jugement rendu par le tribunal administratif et la déclaration de l’illégalité de cette décision, ainsi qu’une somme de 4 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative à la charge de l’Etat.

L’objet du contentieux : contrôle de l’inaptitude ou de la cause de l’inaptitude ?

Lorsque l’inspecteur du travail doit se prononcer pour autoriser ou non le licenciement d’un salarié protégé, il doit s’assurer que la demande d’autorisation de licenciement ne soit pas en rapport avec les fonctions représentatives exercées par l’intéressé, ou son appartenance syndicale.

Dans cette affaire, l’objet du contentieux portait sur le fait de savoir si l’inspecteur du travail devait rechercher (ce que soutenait la salariée) ou non, si l’origine de l’inaptitude était liée à l’exercice de son mandat.

Sur le plan juridique, la question est de savoir si c’est le motif du licenciement (c’est à dire l’existence de l’inaptitude et de l’impossibilité d’un reclassement), ou la cause de l’inaptitude que doit examiner l’inspecteur du travail ? Selon la réponse, la décision de l’inspecteur du travail ne sera pas la même, si l’inaptitude est causée par le harcèlement du salarié protégé qui peut être liée aux fonctions représentatives ou syndicales faisant l’objet de la protection légale.

La question est d’autant plus importante que le contrôle du caractère réel et sérieux du licenciement échappe à la justice prud’homale, lorsqu’une autorisation administrative a été donnée à l’employeur pour le licenciement d’un salarié protégé. Selon la répartition entre les juridictions le juge administratif est, en effet,  le seul à pouvoir apprécier le bien-fondé de la décision de l’inspecteur du travail.

La décision du Conseil d’Etat : contrôle de l’inaptitude

Le Conseil d’Etat a rejeté la requête de la salariée.

Ainsi le Conseil d’Etat considère-t-il que dans le cas où une demande de licenciement d’un salarié protégé est motivée par l’inaptitude :

  • l’inspecteur du travail doit vérifier que l’inaptitude du salarié et l’impossibilité de reclassement sont réelles et justifient son licenciement ;
  • il ne lui appartient pas, dans l’exercice de son contrôle, de rechercher la cause de l’inaptitude, y compris dans le cas où un harcèlement moral dont l’effet, selon la loi, serait la nullité de la rupture du contrat de travail ;
  • la décision de l’inspecteur du travail ne fait pas obstacle à ce que le salarié, s’il s’y estime fondé, fasse valoir devant la justice prud’homale les droits résultants de l’origine de l’inaptitude.

(Conseil d’État, 4ème et 5ème sous-sections réunies, 20/11/2013, N° : 340591)

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Conclusion : Le Conseil d’Etat considère que si l’administration du travail doit vérifier si l’inaptitude du salarié protégé est réelle et justifie son licenciement,il ne lui appartient pas de rechercher la cause de cette inaptitude, y compris dans le cas où la faute de l’employeur invoquée par le salarié résulte d’un harcèlement moral.

Précisons que la nullité du licenciement ne pourra pas être retenue par la justice prud’homale, comme pour un salarié non protégé, si elle constate que la cause de l’inaptitude est le harcèlement. La validité du licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement aura été décidée par l’autorité administrative. Par contre, des indemnités pourront être décidées.

Article rédigé par Pierre LACREUSE, Sciences-Po Paris, licence en droit et DESS Université de Paris I Panthéon-Sorbonne, ancien Directeur de la Gestion du personnel et des Relations Sociales, DRH, puis chef d’entreprise (PME), aujourd’hui éditeur juridique et relations humaines sur internet.

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                    Le licenciement pour inaptitude d’un salarié protégé

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Sources : jurisprudence du Conseil d’Etat Légifrance.gouv.fr

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