Urgence d’une contestation de l’inaptitude

En cas d’erreur lors d’un avis d’inaptitude, le salarié doit contester celui-ci devant les prud’hommes dans les 15 jours. Et cela, quelque que soit le type d’erreur commise par le médecin du travail. A défaut, la contestation du licenciement pour inaptitude pour ce motif ne pourra pas aboutir. Jurisprudence de la Cour de cassation du 25 octobre 2023.

Origine de l’affaire : l’avis d’inaptitude et le licenciement pour inaptitude

Un salarié engagé en 2005 comme préparateur aéronautique est devenu « responsable d’activité préparation A 340 », en 2006. Cela en plus de ses fonctions.

En arrêt de travail depuis le 8 janvier 2018, le médecin du travail a déclaré le salarié inapte au poste de coordinateur le 26 avril 2018. Ce faisant le médecin du travail s’est prononcé en faisant erreur sur l’emploi occupé par le salarié. Sur l’avis d’inaptitude, le médecin du travail a précisé que l’état de santé du salarié faisait obstacle à tout reclassement dans un emploi. Sur cette base, l’employeur l’a licencié le 29 mai 2018 pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Le contentieux prudhommal

Contestant son licenciement pour inaptitude, le salarié a saisi la juridiction prud’homale. Après le Conseil des prudhommes, la Cour d’appel de Toulouse se prononça en faveur du salarié.

Selon la Cour d’appel, l’article R. 4624-45 du code du travail (qui prévoit un mode de recours spécifique) « ne précise rien s’agissant d’une contestation portant sur des éléments qui ne sont pas de nature médicale ». Et, elle en a déduit, la possibilité de contester l’avis d’inaptitude devant le conseil de prud’hommes, dans le cadre d’une contestation du licenciement pour inaptitude, au motif de l’erreur de poste.

L’arrêt de la Cour d’appel, a dit le licenciement pour inaptitude dépourvu de cause réelle et sérieuse, puisque prononcé suite à un avis d’inaptitude pris par le médecin du travail qui avait commis une erreur sur l’emploi occupé par le salarié.

La Cour a donc condamné l’employeur au paiement de diverses sommes au salarié :   

  • Indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents,
  • Complément d’indemnité de licenciement
  • Et dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

En outre, selon l’arrêt, l’employeur devait remettre au salarié un bulletin de salaire du mois de mai 2018. Ainsi qu’une attestation Pôle emploi modifiés. Enfin, la Cour ordonnait aussi le remboursement à Pôle emploi des indemnités de chômage payées au salarié durant six mois.

(Cour d’appel de Toulouse, 19 novembre 2021 N° : 19/04788)

Le pourvoi en cassation

Par suite, l’employeur a formé un pourvoi en cassation.

Le pourvoi rappelait que le code du travail prévoit la possibilité pour le salarié (comme pour l’employeur) de saisir le Conseil de prud’hommes d’une contestation de l’avis d’inaptitude. En référé à l’époque de l’avis d’inaptitude et du licenciement. Et selon la « procédure accélérée au fond » depuis le 1er janvier 2020. (1)

Réponse de la Cour de Cassation

La Cour de Cassation a d’abord rappelé qu’en application des articles L 4624-7 et R. 4624-45 du code du travail :

  • « Le salarié, comme l’employeur, peut saisir le conseil de prud’hommes [ * ] d’une contestation portant sur les avis, propositions, conclusions écrites ou indications émis par le médecin du travail reposant sur des éléments de nature médicale ». (Article L4624-7 du code du travail).  A l’époque, la saisine était « en la forme des référés ». Depuis le 1er janvier 2020, c’est la « procédure accélérée au fond » qui s’applique. (1)
  • Que le médecin du travail est « seul habilité à constater une inaptitude au travail ».
  • Et que le conseil de prud’hommes doit être saisi dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l’avis d’inaptitude par le médecin du travail.

Aussi, contrairement à la Cour d’appel, le Cour de cassation a décidé que toute contestation de l’avis d’inaptitude, quel qu’en soit le motif, ne peut être présentée que selon la procédure prévue par les articles L 4624-7 et R. 4624-45 du code du travail. Le juge du licenciement ne peut donc pas, quel qu’en soit les raisons, remettre en cause l’avis d’inaptitude.

Par conséquent, la Cour de cassation a cassé et annulé l’arrêt de la Cour d’appel. Sauf pour le complément d’indemnité que n’avait pas contesté l’employeur.

(Cour de cassation, chambre sociale, 25 octobre 2023, N° : 22-12.833).

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(1) La procédure accélérée devant le conseil des prud’hommes permet de juger rapidement le fond d’un litige, sans passer par la phase de conciliation. La forme du référé avait le même objectif, mais était juridiquement moins bien choisie, puisque normalement le référé n’a pas pour objectif de trancher le fond du litige, mais d’ordonner des mesures provisoires ou conservatoires.

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