Le risque de précipiter le licenciement
Il y a un risque de précipiter le licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement pour l’employeur. L’employeur, qui considérant le reclassement du salarié impossible, engage trop vite après l’avis d’inaptitude, la procédure de licenciement, en convoquant le salarié à l’entretien préalable, risque de voir le licenciement dit sans cause réelle et sérieuse. Peu importe que le salarié considère le reclassement impossible, ou refuse tout reclassement. Jurisprudence de la Cour de cassation.
La procédure rapide de licenciement pour inaptitude par l’employeur
Une salariée engagée par un Cabinet de gestion locative et syndic de copropriété, en qualité de secrétaire de direction, a fait l’objet d’un avis d’inaptitude par le médecin du travail, à l’issue de deux visites médicales les 1er et 15 avril 2010.
Le jour même de l’avis d’inaptitude, l’employeur a envoyé une convocation à l’entretien préalable de licenciement à la salariée. A la suite, l’employeur a procédé au licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement de la salariée, qui a été notifié le 7 mai 2010.
Le contentieux sur la procédure précipitée de licenciement pour inaptitude
Contestant le caractère réel et sérieux du licenciement, la salariée a saisi la juridiction prud’homale. Le conseil de prud’hommes lui a donné satisfaction. L’employeur a, alors, fait appel de ce premier jugement.
Pour la cour d’appel, la procédure n’était pas contestable
Pour débouter la salariée de ses demandes, la cour d’appel a considéré qu’il ne pouvait pas être déduit du fait que la lettre de convocation à l’entretien préalable avait été envoyée le jour de l’avis d’inaptitude, qu’aucune possibilité de reclassement n’avait été recherchée par l’employeur. La cour d’appel a souligné que la seconde fiche de visite avait été rédigée par le médecin du travail dans les mêmes termes que la première et affirmé que le délai de quinze jours entre les deux visites était destiné à engager une réflexion sur le reclassement.
La cour d’appel en a déduit :
- que l’employeur avait disposé de ce délai pour examiner les différentes possibilités de reclassement, ce qui pouvait être fait rapidement, puisque l’entreprise était composée d’une seule structure, avec seulement sept salariés dont les dirigeants
- et qu’ainsi, les possibilités d’emploi pouvaient être examinées sans consultation d’autres établissements, par une personne connaissant parfaitement l’entreprise.
(Arrêt de la Cour d’appel de Paris, du 5 décembre 2013).
La salariée, à la suite de ce second jugement plein de bon sens, a formé un pourvoi en cassation.
La Cour de cassation a rappelé le droit
La Cour de cassation, qui juge le respect du droit, a cassé et annulé l’arrêt de la cour d’appel :
- en considérant que « seules les recherches de reclassement compatibles avec les conclusions du médecin du travail émises au cours de la visite de reprise [comprendre la deuxième visite, à l’issue de laquelle le médecin du travail émet son avis] peuvent être prises en considération pour apprécier le respect par l’employeur de son obligation de reclassement ».
- pour conclure « qu’en statuant comme [la cour d’appel] l’a fait, alors qu’il ressortait de ses constatations que l’employeur n’avait pas recherché de possibilités de reclassement postérieurement au second avis d’inaptitude, la cour d’appel a violé le texte susvisé ».
(Cour de cassation, chambre sociale, 4 novembre 2015, n° 14-11879).
Conclusion : La cour de cassation considère que la loi impose que seules les recherches de reclassement compatibles avec les conclusions du médecin du travail émises lors du prononcé de l’avis d’inaptitude définitive soient prises en considération pour apprécier le respect par l’employeur de son obligation de reclassement. En conséquence, la recherche de reclassement doit être menée, ou se poursuivre, après l’avis définitif d’inaptitude.
L’employeur ne doit donc pas se précipiter pour conclure à l’impossibilité d’un reclassement, même si celle-ci est une évidence et n’est pas contestée par le salarié, qui peut souhaiter en finir au plus vite. L’absence de délai, comme dans le cas d’espèce, ou même un délai trop peu important, entre l’avis d’inaptitude à l’issue de la seconde visite (ou de la visite unique) et la convocation du salarié à l’entretien préalable, conduira la justice prud’homale à dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse, si elle est saisie. L’employeur devra, de plus, s’armer de preuves de sa recherche réelle.
NB : Une exception existe depuis la loi du 17 août 2015. Elle concerne le cas du salarié dont l’inaptitude est d’origine professionnelle, lorsque le médecin du travail mentionne expressément sur l’avis d’inaptitude que « le maintien du salarié dans l’entreprise serait gravement préjudiciable à sa santé ». Dans ce seul cas, le licenciement pourra être immédiatement engagé avec la convocation du salarié à l’entretien préalable.
Article rédigé par Pierre LACREUSE, Sciences-Po Paris, licence en droit et DESS Université de Paris I Panthéon-Sorbonne, ancien Directeur de la Gestion du personnel et des Relations Sociales, DRH, puis chef d’entreprise (PME), aujourd’hui éditeur juridique et relations humaines sur internet.
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Sources : code du travail et jurisprudence arrêt de la Cour de cassation : Legifrance.gouv.fr
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