Visite qualifiée de reprise

Jurisprudence de la Cour de cassationVisite qualifiée de reprise. Quand une visite auprès du médecin du travail peut-elle être qualifiée de visite de reprise ? Jurisprudence de la Cour de cassation. Un salarié peut prendre l’initiative de demander l’organisation d’une visite au médecin du travail. Mais s’il n’en avise pas son employeur, est-il possible que la visite soit qualifiée de reprise ? Et si l’employeur est avisé lors des visites ? Quelles sont les conséquences si les visites ne sont pas qualifiées de visite de reprise ?

Inaptitude, examens par le médecin du travail, avis d’inaptitude, absence de suite

Un salarié engagé en 1969 par la société Lisi Automotive Rapid, comme régleur sur presses, a eu plusieurs arrêts de travail pour maladie non professionnelle, puis à compter du 1er novembre 2003 a été classé en invalidité de 2ème catégorie.

Ce salarié a alors pris l’initiative, de demander l’organisation d’une visite de reprise au médecin du travail, sans en aviser son employeur. A la suite de sa demande, il a été examiné les 21 novembre et 11 décembre 2003 par le médecin du travail. Les visites médicales de reprise ont eu lieu dans les locaux de l’entreprise et en présence de l’infirmière de l’entreprise. L’employeur a été avisé des visites au moment de leur réalisation dans ses locaux.

Lors de la seconde visite, le médecin du travail a émis un avis d’inaptitude. Le salarié a été maintenu dans les effectifs de l’employeur jusqu’à son départ en retraite, le 1er septembre 2008, sans qu’il ne reprenne jamais le travail et sans que l’employeur ne reprenne le versement de sa rémunération.

Le contentieux : les visites sont-elles ou non reconnues comme des visites de reprise

Le salarié a saisi la juridiction prud’homale pour demander, sur le fondement de l’article L. 1226-4 du code du travail, le paiement de son salaire et des congés payés pour la période du 11 janvier 2004 au 31 août 2008, ainsi que la remise des bulletins de paies et d’une attestation pour Pôle Emploi.

Le conseil de prud’hommes a accueilli favorablement la demande du salarié. Par contre, la Cour d’appel a infirmé ce premier jugement et a débouté le salarié, en considérant que l’avis du médecin du travail ne s’imposait pas à l’employeur, qui n’avait pas été averti de la demande faite par le salarié au médecin (Cour d’appel de Versailles, du 25 avril 2013).

Le pourvoi en cassation

Le salarié débouté décide alors de se pourvoir  en cassation.

Dans son pourvoi, le salarié a fait grief à l’arrêt de la cour d’appel d’avoir rejeté ses demandes, alors, que, selon lui, si l’initiative de la visite de reprise appartient normalement à l’employeur, le salarié peut la prendre en s’adressant soit à son employeur, soit au médecin du travail en avertissant l’employeur de cette demande.

Or selon lui, puisque  les visites médicales de reprise avaient eu lieu dans les locaux de l’entreprise et en présence de l’infirmière de celle-ci, et que l’employeur en avait été avisé au moment de leur réalisation (ce qui fut établi par l’arrêt de la cour d’appel), il en résultait que l’employeur était informé de la demande de visite de reprise faite par le salarié, avant que le médecin ne prononce l’avis à l’issue de la seconde visite.  De ce fait, selon le salarié, en jugeant que l’avis du médecin du travail ne s’imposait pas à l’employeur, qui n’aurait pas été averti de la demande faite par le salarié au médecin, la cour d’appel aurait violé les règles légales.

Le salarié a aussi fait valoir :

  • qu’il y avait eu deux visites espacées d’au moins quinze jours et qu’il avait été déclaré inapte à tout emploi dans l’entreprise de manière définitive ;
  • que n’ayant été ni reclassé ni licencié à l’issue du délai d’un mois suivant l’avis d’inaptitude, son employeur était tenu de reprendre le versement de son salaire normal.

L’entreprise a, pour sa part, soutenu que le salarié n’ayant pas averti préalablement son employeur de sa volonté de saisir le médecin du travail en vue de l’organisation d’une visite de reprise, l’examen par le médecin du travail ne constitue pas une visite de reprise opposable à l’employeur.

L’arrêt de la Cour de cassation

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La Cour de cassation a clairement indiqué « que la visite de reprise, dont l’initiative appartient normalement à l’employeur, peut aussi être sollicitée par le salarié, soit auprès de son employeur, soit auprès du médecin du travail en avertissant au préalable l’employeur de cette demande, qu’à défaut d’un tel avertissement, l’examen ne constitue pas une visite de reprise opposable à l’employeur ».

Constatant qu’après avoir relevé que le salarié « avait pris l’initiative, sans en aviser la société Lisi Automotive Rapid, de demander au médecin du travail d’organiser une visite de reprise », la Cour de cassation a jugé que «  la cour d’appel, qui, par une appréciation souveraine de l’ensemble des éléments de preuve produits devant elle, a retenu que l’employeur n’avait été informé des deux examens des 21 novembre et 11 décembre 2003 qu’au moment de leur réalisation dans les locaux de la société, en a exactement déduit que l’avis d’inaptitude n’était pas opposable à cet employeur ».

Par conséquent, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi du salarié.

(Cour de cassation, chambre sociale, 7 janvier 2015, N°: 13-20126)

Conclusion : L’initiative de la visite de reprise appartient normalement à l’employeur. Cependant, elle peut aussi être sollicitée par le salarié, soit auprès de son employeur, soit auprès du médecin du travail, mais attention dans ce dernier cas il doit obligatoirement  avertir au préalable l’employeur de cette demande. A défaut d’avertir l’employeur, l’examen médical ne constitue pas une visite de reprise et ni cette visite ni l’avis d’inaptitude ne seront opposables à l’employeur.

Article rédigé par Pierre LACREUSE, Sciences-Po Paris, licence en droit et DESS Université de Paris I Panthéon-Sorbonne, ancien Directeur de la Gestion du personnel et des Relations Sociales, DRH, puis chef d’entreprise (PME), aujourd’hui éditeur juridique et relations humaines sur internet.

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Sources : jurisprudences de la Cour de cassation Légifrance.gouv.fr

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